CHAPTER TWELVE

Twelfth Chapter (Version E: First Printed Version, 1740)

Chapitre XII.

Du Mouvement composé

§271.

1 [243] Paragraph summary: Définition du mouvement composé. Le Mouvement composé est celui dans lequel le Corps obéït à la fois à plusieurs forces, qui lui impriment des directions différentes, & qui le font tendre en même tems vers divers points.

2 §. 272. Le mouvement d’un Corps, qui est poussé en même tems par deux forces, est different selon que l’action de ces forces est dirigée.

1°. Si ces forces agissent dans la même direction, le mobile se meut plus vîte, mais la direction de son mouvement n’étant point changée, [244] ce Corps se meut d’un mouvement simple.

Paragraph summary: Des différences que les direction des forces, qui poussent un Corps, apportent dans son mouvement. 2°. Si ces deux forces sont égales et opposées l’une à l’autre, elles se détruisent mutuellement. Alors le Corps ne sort point de sa place et il n’y a aucun mouvement produit.

Paragraph summary: Des différences que les direction des forces, qui poussent un Corps, apportent dans son mouvement. 3°. Si les forces oposées sont inégales, elles ne se détruisent qu’en partie; & le mouvement qui en résulte, est l’effet du restant de ces deux forces.

4°. Si ces deux forces sont perpendiculaires l’une à l’autre, comme, par exemple, la force désignée Marginal note: Fig 19. Planch. 4. par la Ligne AB. à la force active désignée par la Ligne AD. elles ne se détruiront ni ne s’acceleront: chacune agira sur le Corps comme s’il étoit en repos; alors le chemin du mobile sera changé, et ce Corps aura un mouvement composé du mouvement imprimé par ces deux forces.

Il n’y a que dans le cas où les deux forces qui agissent sur le Corps, sont perpendiculaires l’une a l’autre, dans lequel chacune agisse sur lui comme si ce Corps étoit en repos.

5°. Enfin, si ces deux forces sont obliques l’une à l’autre, comme la force Marginal note: Planch. 4. Fig. 20 & 21. AF. à la force AE. ou bien comme la force AG. à la force AH. elles retarderont ou acceleront le mouvement l’une de l’autre, selon que l’obliquité des Lignes qui les représentent, sera dirigée, & elles auront outre cela une action perpendiculaire l’une à l’autre, selon laquelle elles n’acceleront ni ne retarderont le mouvement l’une de l’autre. [245]

3 §. 273. Si le corps A est mû par une force quelconque dans la direction AB. & avec la vîtesse désignée par cette Ligne AB. et que ce Corps soit poussé en même tems par une autre force, qui lui imprime la direction & la vîtesse AC. ce Corps étant mû par deux forces qui tendent en même tems à lui faire parcourir les Marginal note: Fig. 22. deux Lignes AB. AC. il obéira à ces deux forces, selon la quantité de leur action sur lui; & ce Corps aura un mouvement dont la direction & la vîtesse seront composées, de la vîtesse & de la direction des deux forces qui agissent sur lui.

4 §. 274. Pour déterminer quelle ligne un Corps qui est ainsi mû decrira dans son mouvement, imaginons que la ligne AC. & la ligne AB. Marginal note: Fig, [sic] 22. soient divisées dans les parties égales entr’elles A, e, g, i, o, C. & A, F, H, K, M, B. & supposons que tandis que le mobile A parcourt les divisions de la ligne AC. cette ligne coule parallellement à elle-même le long de la ligne AB. ensorte que dans le même tems, pendant le quel le Corps A. parcourt sur la ligne AC. l’espace Ae, la ligne AC. parcourt sur la ligne AB. l’espace AF; il est certain qu’au bout de ce premier moment, le mobile se trouvera au point E. De même si dans le second instant, pendant lequel le mobile va de e. en g. sur la Marginal note: Fig. 22. ligne AC. cette ligne coule de F. en H. sur la [246] ligne AB. le mobile au bout de ce second instant sera en G. par la même raison il sera en I. Paragraph summary: Un Corps mû par deux forces, parcourt la diagonale d’un parallelogramme. au bout du troisiéme instant, puis en O dans le quatriéme, puis enfin en D. dans le cinquiéme. Ainsi, si l’on tire les lignes CD. BD. parallelles à AB. & à AC. & qu’on acheve ainsi le paralelogramme ABCD. le Corps en obeissant aux deux forces AB. AC. qui agissent sur lui en même tems, décrira la diagonale AD. de ce paralelogramme; car la force qui le pousse vers AB. fait sur lui le même effet que le mouvement, par lequel j’ai supposé que la ligne AC. parcouroit la ligne AB.

5 La quantité du transport du Corps vers la ligne BD. est donc l’effet de la force qui agit de A. vers B. & la quantité de son transport vers la ligne CD. est l’effet de celle qui agit de A. vers C. ainsi, ces forces se retrouvent encore distinctes dans leur effet composé.

6 §. 275. Le mobile parcourt cette diagonale AD. dans le même tems dans lequel il auroit parcouru les lignes AC. AB. separement; car par la seule force dirigée vers AB. le Corps s’aprochera de la ligne BD. dans le même tems, soit que la force vers AC. lui soit imprimée ou non; de même, il s’approchera de la ligne CD. dans le même tems par la force qui le dirige vers AC. soit que la force vers AB. lui soit imprimée, soit qu’elle ne le soit pas. Donc lorsque la ligne AC. que j’ai supposée couler sur la ligne AB. [247] sera arrivée en BD, le Corps A. qui parcourt cette ligne AC. sera alors au point C. de cette figure AC. mais le point C. & le point D. seront alors coincidents; Ainsi, tout Corps qui est mû par deux puissances qui font entr’elles un angle quelconque, parcourt la diagonale du paralelogramme formé sur les lignes, dont la longueur & la position représentent la direction & la vîtesse de ces deux F: puissances forces; & cette diagonale représente la vîtesse du mouvement composé, & elle est le resultat des mouvemens im primés au mobile.

7 §. 276. Il suit de-là que le mouvement d’un Corps peut toujours se résoudre en deux au tres mouvemens, en faisant que la ligne dans laquelle un Corps se meut, devienne la diagonale d’un paralelogramme dont les deux côtés, dans leur longeur & leur position, représenteront les directions & les vîtesses des deux mouvemens, dans lesquels celui du Corps que l’on considére sera resolu.

8 §. Marginal note: Fig. 23. 277. L’angle EAB. que les lignes AB. AE. qui marquent les directions des forces, font en tre elles, s’apelle l’angle de direction.

9 §. 278. La ligne parcourue par un Corps poussé en même tems par deux forces, est plus ou moins longue selon l’angle de direction des forces qui le poussent; car supposé que les lignes AE. AB. [248] soient égales dans les Figures Marginal note: Fig. 24. 25. & 26. 24. 25. & 26 on voit aisément que la ligne AD qui est le chemin que le mobile parcourt dans le même tems, n’est pas égale dans ces trois Figures.

10 §. 279. Plus l’angle de direction EAB. est aigu, comme dans la Fig. 24. plus la ligne AD. que le Corps parcourt est longue; & plus cet angle EAB. est obtus comme dans la Fig. 25. plus le chemin du mobile est court; car dans le premier cas la force qui pousse le Corps dans la ligne AE. & qu’on peut résoudre dans les Marginal note: Fig. 24. lignes Af. & Ag. conspire avec la force qui pousse le Corps vers AB. & l’augmente de la quantité Ag. F: outre ou de son action perpendiculaire vers F: Af. laquelle ne contribue en rien à la translation du corps vers AB; Af. & dans le second cas la force qui pousse le Corps Marginal note: Fig. 25. vers AE. décomposée comme dans le cas précedent, s’oppose à la force vers AB. & la diminuë de la quantité Ag. Ainsi, dans le premier cas, le mobile doit parcourir plus d’espace, F: puisqu’il est tiré en même tems par deux puissances vers AB. & puisque sa vîtesse est augmentée, & par la raison contraire, il doit en parcourir moins dans le second; F: je ne considère ici que l’action des puissances qui poussent les Corps. car le tems de son mouvement est supposé le même.

11 §. 280. Comme les deux côtès d’un triangle pris ensemble, sont toujours plus longs que le troisiéme Not in F (Euclide, Livre premier, Prop. 20.) le Corps A. va par un chemin plus court, lors qu’il obéit, à la fois, à deux puissances quelcon [249] ques, que s’il obéissoit successivement à chacune d’elles en particulier.

12 §. 281. On voit par l’inspection de la Fig. 24. que le chemin d’un mobile peut être la diagonale d’une infinité de paralelogrammes divers; car la ligne AD. est en même tems la diagonale des paralelogrammes AEBD. & Af Dh. &c.

13 §. 282. Ainsi, un Corps peut parcourir la même ligne droite dans le même tems, soit qu’il soit poussé par plusieurs forces, ou par une seule force; le Corps A. par exemple, parcourera également la ligne AD. dans un tems donné, Marginal note: Fig. 23. s’il est poussé par une seule force dirigée vers AD. & qui lui împrime cette vîtesse AD. ou par les deux forces AB. AE. qui lui impriment les vîtesses désignées par ces lignes AB. AE. & l’on peut également considérer le Corps qui parcourt la ligne AD comme étant mû par ces deux différentes forces, ou par une seule qui leur soit égale; car la vîtesse ou le mouvement vers AD. ne contient que la vîtesse AB. dans la direction AB. & que la vîtesse AE. dans la direction AE. Ainsi, l’effet est toujours le même, lorsque le mobile est poussé par trois ou quatre, ou une quantité quelconque de forces réünies, ou bien par une seule force qui lui imprime la même vîtesse dans la même direction dans laquelle l’action de ces differentes forces se réüniroit; & [250] l’on peut également considérer toutes ces forces comme étant réünies dans celle qui les représente, ou cette force unique, comme étant divisée dans les forces qui la composent.

14Paragraph summary: De la résolution & de la composition du mouvement. Utilité de cette méthode. §. 283. Ces deux différentes façons de considérer le mouvement des Corps, s’apellent résolution & composition.

15Cette méthode est d’un grand F: usage dans les méchaniques, car en déconposant ainsi le mouvement des Corps, on connait la quantité de leur action sur les obstacles qu’ils pressent & la quantité de la résistance de ces obstacles, les Corps n’agissant, & ne résistant que par leur action perpendiculaire.usage, et d’une grande utilité dans les Mechaniques, pour découvrir la quantité de l’action des Corps qui agissent obliquement les uns sur les autres.

16 §. 284. Paragraph summary: Comment on connoît le chemin du mobile dars [sic] toutes les compositions du mouvement. F: Comment on connoît le chemin du mobile dans toutes les compositions du mouvement. On connoît le chemin d’un mobile mû par deux forces quelconques, lorsque l’on connoît la vîtesse que chacune de ces deux forces lui imprime, & l’angle que leurs directions font entr’elles; car ce chemin est le troisiéme côté d’un triangle dont on connoît les deux autres côtés, & l’angle compris.

17 §. 285. Par ce moyen on connoît le chemin d’un Corps qui obéït à un nombre quelconque de forces qui agissent sur lui à la fois; car lorsqu’on a déterminé le chemin que deux de ces forces font parcourir au mobile par la régle de la §. précédente, ce chemin devient le côté d’un nouveau triangle, dont la ligne qui représente la troisiéme force devient le second côté, & le chemin du mobile la base; en procédant ainsi jusqu’à la derniere force, on parviendra à [251] connoître le chemin du mobile par l’action réunie de toutes les forces qui agissent sur lui; car le Corps A. poussé par les deux forces E. & D. dans les directions, & avec les vîtesses AB. AG. décrira la diagonale AH poussé ensuite par la force C. dans la direction, et avec la vîtesse AF. il parcourera la ligne AT. Enfin, la force M. lui fera décrire la ligne AL. en lui imprimant la direction & la vîtesse AK. Ainsi, AL. est le chemin du mobile A. poussé en meme tems par les forces E, D, C, M.

18 §. 286. Un Corps peut éprouver plusieurs mouvemens à la fois; car un Corps que l’on jette horisontalement dans un batteau, par exemple, éprouve le mouvement de projectile qu’on lui communique, & celui que la pésanteur lui imprime à tout moment vers la Terre; il participe outre cela au mouvement du vaisseau dans lequel il est. La Riviere sur laquelle est ce vaisseau s’écoule sans cesse, & le Corps participe à ce mouvement. La Terre sur laquelle coule cette Riviere, tourne sur son axe en vingt-quatre heures; voilà encore un mouvement nouveau que le Corps partage: Enfin, la Terre a encore son mouvement annuel autour du Soleil, la révolution de ses poles, le balancement de son équateur, &c. & le Corps que nous considérons participe à tous ces mouvemens; mais il n’y a que les deux premiers qui lui F: appartiennent, & qui le fassent être réellement en mouvement appartiennent, par rapport à ceux qui sont tran [252] portés avec F: lui le Corps dans ce batteau; car tous les Corps qui ont un mouvement commun avec nous, sont comme en repos par rapport à nous.

19 §. 287. Un Corps qui reçoit plusieurs déterminations, demeure dans la derniere comme dans le dernier degré de vîtesse, s’il est abandonné à lui-même, & qu’aucune force n’agisse davantage sur lui; F: & il il conserve cette détermination & cette vîtesse, jusqu’à ce que la rencontre de quelque obstacle lui fasse perdre son mouvement, en consumant sa force, ou que quelque nouvelle puissance change sa direction. Cet effet est une suite nécessaire de la premiere Loi du mouvement, fondée sur la force d’inertie de la matiére.

20 §. 288. Le mouvement composé, peut être uniformément ou non uniformément acceleré comme le mouvement simple.

21 Paragraph summary: Du mouvement en ligne courbe.Si les deux forces qui poussent le Corps, sont inégalement accelerées, ou bien si l’une est accelerée, tandis que l’autre est uniforme, la ligne décrite par le Corps en mouvement, ne sera plus une ligne droite, mais une ligne courbe dont la courbure sera differente, selon la combinaison des inégalités des forces qui la font décrire; car ce Corps obéira à chacune des forces qui le poussent, selon la quantité de son action sur lui (2e. Loi §. 229.) Ainsi, Not in F par exemple, [253] s’il ya une des forces qui renouvelle son action à chaque instant, tandis que l’action de l’autre force reste la même, le chemin du mobile sera changé à tout moment: et c’est de cette façon que tous les Corps que l’on jette retombent vers la terre (Chap. 19.)

22 §. Paragraph summary: Le mouvement en ligne courbe, est toujours un mouvement composé. 289. Tout mouvement en ligne courbe est nécessairement un mouvement composé du mouvement qui fait aller le Corps en ligne droite, & du mouvement qui l’en retire; car décrire une ligne courbe, c’est changer à tout moment de direction

23 §. Paragraph summary: Le mouvement est toujours en ligne droite dans un instant infiniment petit. 290 Le F: mouvement dans un instant infiniment petit mouvement se fait toujours en ligne droite; car bien qu’un Corps mû par deux forces qui lui impriment des vîtesses inégalement accelerées, décrive une ligne courbe; cependant le mouvement partial de ce Corps est toujours en ligne droite, & son mouvement total n’est F: en en en ligne courbe, que parce que les points vers lequels le mobile est dirigé changent a chaque moment, & que la petitesse des droites que ce mobile parcourt à chaque insant, nous empêchant de les distinguer chacune en particulier, tout cet assemblage de lignes droites infiniment petites & inclinées les unes aux autres, nous paroît une seule ligne courbe; mais chacune de ces petites droites représente la direction du mouvement à chaque instant infiniment petit, & elle est la [254] diagonale d’un paralelogramme F: dont les côtés représenteroient formé sur la direction des forces actuelles qui agissent sur ce Corps: ainsi, le mouvement est toujours en ligne droite à chaque instant infiniment petit, de même qu’il est toujours uniforme.

24 §. 291. Si la force acceleratrice cessoit tout d’un coup d’agir, le Corps continueroit à se mouvoir dans la ligne droite dans laquelle il se trouveroit dirigé dans cet instant; car tout Corps qui se meut continue à se mouvoir dans une ligne droite, & avec des vîtesses égales lorsque rien ne l’en empêche selon la premiere Loi du mouvement (§. 229.) c’est en suivant cette Loi que tout Corps qui se meut en rond tend à s’échapper par F: la sa tangeante; & c’est ce qu’on appelle la force centrifuge

25 §. 292. Il y a encore une autre sorte de mouvement circulaire, c’est le mouvement Not in F relatif d’un Corps qui tourne sur lui-même, comme la terre, par exemple, dans son mouvement journalier: ce sont alors les parties de ce Corps qui tendent à décrire des droites infiniment petites dont je viens de parler (§. 290.)

26 On peut definir cette sorte de mouvement circulaire, un mouvement dans lequel les parties changent de place, quoique le tout n’en change point.

How to cite:

CHAPTER TWELVE, Version E. In: Du Châtelet, Émilie: Institutions de physique. The Paris Manuscript BnF Fr. 12265. A Critical and Historical Online Edition.
Edited by Ruth E. Hagengruber, Hanns-Peter Neumann, Aaron Wells, Pedro Pricladnitzky, with collaboration of Jil Muller. Center for the History of Women Philosophers and Scientists, Paderborn University, Paderborn. Version 1.0, April 10th 2024, URL: https://historyofwomenphilosophers.org/dcpm/documents/view/chapter_twelve/version/e/rev/1.0