CHAPTER ONE
- CHAPTER ONE
- First Chapter (Version C)
First Chapter (Version C)
des principes de nos raisonnemens
1 [25/26r] Toutes nos connoissances sont baties sur de certains princi
pes qui en sont lefondemt.
Lesprit apercoit aisement les
verités qui y tiennent immedi
atemt, mais on perd aisemt devuë celles auxquelles on
ne peut arriver que par un grand
nombre deconsequences liées les unes
aux autres, il est donc tres important
de se rendre attentif aux premiers
principes et a la façon dont les
verités en dependent.
2 Ce n’est pas suivre un bon chemin que de s’en va porter a un certain
sentiment A: vif et inte[rne] or vif et inti[me] intime declarté et d’evidence, car A: chacun ayant les gens qui ont des sentimens diferens, ont cependant chacun
ce sentiment vif dece quil avance
ainsi les disputes doivent rester
Eternellemt indecises puisqu’ils satis
font tous Egalemt acette regle.
Il ne faut donc rien admettre come
Evident que cequi decoule A: par des verités incontestables premiers par des consequences legitimes des
principes que l’on a une fois Etabli [26v] et rejetter come faux tout cequi repugne a ces principes quoiqu’en
puisse dire l’imagination.
3 Un peu dattention ala façon dont on procede dans la science ou la
certitude est portée ason plus haut
point suffira pr vous A: convaincre de l’utilité faire sentir l’utilité decette methode, il ni a gueres d’idée plus claire que celle
dela possibilité dun triangle Equi
lateral, et que les deux cotes
dun triangle sont plus grans pris
Ensemble que le 3.e cependant Euclide ce severe raisoneur
ne s’est point contenté d’enapeler
ace sentimt vif et clair pr prouver
les propositions, mais il a demontré
A: quelles decouloient dune maniere incontestable des principes quil avoit coment il faut s’y prendre pour construire un triangle Equilateral, et quil impli
que contradiction que les 2 Cotés dun triangle pris
ensemble ne soient pas plus grands
que le troisieme. [26/27r]
4 Toutes nos connoissances decoulent de deux principes
l’un est le principe decontradiction
et lautre celui dela raison sufissante
le premier est le fondement dela
geometrie etdetoutes les verités
necessaires, etle second est le
fondemt des verités contingentes.
5 Ce principe A: quon apelle princ[ipe de contracdiction] de Contradiction ason fondement dans l’impossibilité
ou ns somes de forcer notre esprit
a reconnoitre que quelque chose
est, et n’est pas en meme tems
car ns ne pouvons ne point avoir une
idée pendant que ns l’avons, ni
voir un corps blanc delameme
façon que s’il Etoit noir, lorsque
ns le voyons blanc, ce principe
est inné dans l’home, A: et les les pirrhoniens qui doutoient de
tout ne l’ont Not in Acependant jamaisnié, et mr
descartes la employé dans ses principes
pr parvenir ala premiere conoissance [27v] de notre Existence Etant certain que celui qui doutteroit sil Existe
auroit dans son doutte meme une
preuve deson Existence puisque
s’il nexistoit point, il nepouroit
doutter, ce principe est donc le fondemt
de A: toutes toute certitude dans les connoissances humaines car si lon accordoit une fois quequelque
chose peut A: alafois exister Exister et nexister pas en meme tems, il ni auroit plus de verité
A: tout ceque chaque chose pouvant chaque chose pouroit Etre ou netre pas selon la fan
taisie de chacun, sans ce principe
il ni auroit nulle verité dans
A: les nombres lageometrie, ni dans les nombres car 2 fois 2 pouroient faire 4 et 6 egalemt et meme a
la fois.
6 Il nait dece principe une regle bien importante
cest que lorsque ns avançons
quune proposition est impossible
ns sommes tenus demontrer qu’on
y nie et que lon y affirme alafois la
meme chose A: en meme tems ou bien quelle contredit a une autre al’existence delaquelle ns sommes avancés cette regle Eviteroit bien des disputes
si elle etoit suivie, car Not in Aelle ote toute le doute des propositions et elle feroit [27/28r] voir tout d’un coup linsuffisance des preuves deceux qui A: avancent regardent come impossible tout cequi est contraire
aleurs opinions.
7 Le second principe de nos connoissances est celui dela raison suffisante, ce
principe est aussi incontestable que
celui de la contradiction, tous
les homes le suivent dans leurs
actions, car ils A: nadme[ttent rien] nesedeterminent arien sans une raison suffisante qui leur montre pourquoi A: la telle chose est A: plutost [...] preferable preferable a une autre, il est lefondemt detous les
raisonems qui ne sont point batis sur le principe de contradiction.
8 Quand ondemande comte a une autre de ses actions on ne se contente
point que les raisons quel’on ns Read: donne done ne soient suffisantes, et ns poussons
nos questions jusqu’aceque ns soyons
parvenus adecouvrir unetelle
raison qui ns satisfasse, et ns
recoinnoissons dans tous les cas que
ns ne pouvons point forcer notre
Esprit a admettre quelque chose sans [28v] raison sufisante, c’est adire, sans une raison qui fasse pleinement comprendre pourquoi la chose est plutot ainsi que tout autrement.
9 Le rien ne peut contenir laraison dequoique ce puisse etre,
A: car ce, aquoi il ne convient nulle idée car on apelle rien ce qui n’est ni Existant, ni possible, ainsi il ne peut convenir aucun
idée au rien, or ce a quoi il ne peut convenir
aucune idée, ne peut servir
de fondement aune idee vraie et reelle
ainsi il faut que chaque chose ait sa
raison sufissante pourquoi elle est
ainsi et non pas autremt dans quelque
chose de positif. Si on vouloit nier
cegrand principe ontomberoit
dans des contradictions perpetuelles
car ie ne pourois assurer daucune chose
qu’elle est la meme, puis que cette
chose peut se changer a tout moment
en une autre d’une autre espece
des que javance qu’il peut arriver
quelque changemt sans une raison suf
fisante.
10 J’assure P E que tout est encore dans ma chambre dans letat ou ie lay laissé
parce que ie suis assuré que personne
ni est entré, mais sans le principe de la raison suffisante ma certitude [28/29r] se changeroit en chimere puisque tout pouroit etre bouleversé dans
ma chambre, sans quil y fut entré
personne capable deladeranger,
sans ce principe il ni auroit de
verite pr ns que pr un moment
on ne pouroit plus dire que les
cieux annoncent la gloire A: du seigneur de celui qui les a faits, et que cet univers dont toutes les parties sont si
bien lieés entre elles na pu etre
produit que par une sagesse
supreme, car sil A: ne faut peut arriver des effets sans raison
sufissante, tout cela eut pu etre
produit par lehazard ou parle
rien.
11 Ceque ns voyons arriver quelquefois en songe ns fournit un exemple
d’un monde fabuleux, ou tous
les Evenemens arriveroient sans
raison suffisante.
12 Ie reve que ie suis dans ma chambre occupé a escrire
tout dun coup ma chaise devient
un cheval ailé etie me trouve en un instant dans une autre [29v] ville a cent lieues dela sans avoir passé par les lieux intermediaires
ie retrouve dans cette ville un
grand nombre de personnes qui sont
mortes depuis longtems, et dautres
semblables chimeres, tout cela ne
sauroit arriver dans cemonde parce
quil ni auroit point deraison sufisante
de tous les effets, car lorsque ie sors
dema chambre, ie puis dire comentcela
se fait et pourquoi i’en sors, et
ie ne vais point dun lieu dans
un autre sans passer parles lieux
intermediaires, cependant tous ces
chimeres seroient Egalement
possibles sil pouvoit yavoir des
Effets sans raison sufisante, ainsi
les philosophes qui nient le princi[pe] dune raison sufisante sont des
habitans dun monde fabuleux qui
nexiste point, mais ils nesont point
dece mondeci ou tout doit se faire
avec raison suffisante.
13 Dans la geometrie ou toutes les verités ne sont possibles que d’une seule [29/30r] maniere on ne se sert que du principe de contradiction, mais lebesoin
dune raison sufisante semanifeste
des qu’on passe ades verités contingentes,
car lorsquil est possible qu’une chose
se trouve dans diferens Etats, ie
nepuis assurer qu’elle setrouve dans un
tel Etat plutost que dans A: un tout autre amoins que ie nallegue une raison
deceque j’affirme, par E, ie puis
etre assis, couché, ou debout, toutes
les determinations de mon situation
sont Egalemt possibles, ainsi quand
ie suis debout il faut qu’il yait une
raison sufisante pourquoi ie suis
debout et non pas couché ou
assis, ainsi archimede passant de
la geometrie ala mechanique, et
voulant demontrer qu’une balance
a bras Egaux chargés depoids
Egaux restera En Equilibre, Read: reconnut reconus le besoin dela raison sufisante, et
s’en servit, car pr prouver que
ni l’un ni l’autre des bras ne pouvoit
descendre, il fit voir A: quil ni auroit quela longueur des bras et les poids Etant
egaux, il devoit yavoir equilibre
parcequ’il ni auroit
point de raison sufisante pourquoy
lun descendroit plutost que l’autre. [30v]
14 Mr. de Leibnitz qui Etoit tres attentif aux sources des nos raisone
mens saisit ce principe le developa
et A: lenonça le premier fut lepremier qui l’enonça distinctemt, et qui l’introduisit Read: dans ds les sciences, on ne pouvoit leur
rendre un plus grand service, et
laplus part des faux raisonemens n’ont
dautre A: principe source quel’oubli dece principe, il est le fil qui peut ns
conduire dans les labirinthes derreur
que l’esprit humain s’est A: forgé bati, et dont il est si dificile de se tirer
il faut donc se souvenir del’avoir
toujours devant les yeux, et de
ne rien admettre come vrai decequi
viole cet A: principe axiome fondamental, il estlabride del’imagination qui fait
des Escarts sans nombre des qu’on
Read: nel’assujettit nel’attujettit aux regles d’un raisonemt severe.
15 De cegrand axiome il en nait un autre que mr. de leibnits apelle le principe des indiscernables, ce princi[pe]
banit del’univers toute matiere simi
laire, car sil y avoit 2 parties de [30/31r] matiere absolument similaire et semblables en sorte qu’on peut
mettre l’une ala place del’autre
sans quil arrivait le moindre changemt
car c’est cequ’on apelle parfaitement semblable
il ni auroit point deraison sufisante
pourquoi lune seroit placée
dans lalune et A: non pas lautre sur laterre puisqu’en les changeant et mettant
cellequi est sur laterre dans la
lune, et celle qui est dans lalune sur
laterre toutes choses demeureroient les
memes, on est donc obligé de reconoitre que les
moindres parties dematiere sont
A: discernables en elles et discernables B: et enfinetque chacune est infinimt diferente detoute autre, et quil ni a rien de similaire dans lanature
etquainsi aucune portion dematiere
nepouroit etre employée alaplace
duneautre sans deranger tout l’uni
vers, chacune etant destinée a
remplir lelieu qu’elle remplit, et a
faire l’effet qu’elle fait, dou nait
cette diversité infinie qui setrouve
entre des grains desable come entre
notre globe et celui desaturne,
et qui fait A: admirer le Createur voir que le Createur n’est pas moins admirable dans le plus petit objet que dans le plus grand. [31v]
16 Ns voyons cette diference aussi loin que laportée denos organes
peut s’etendre, mr. deleibnits eut leplaisir devoir confirmer cette
verité parles yeux memes deceux
qui lanioient dans une promenade
quil faisoit avec Read: madame me lelectrice d’hanover & heurenhausen, car ayant assuré
qu’on netrouveroit A: pas jamais deux feuilles semblables dans la
quantité presqu’inombrables decelles
qui les Entouroient, les courtisans
qui Etoient presens passerentune
partie de leur journée a chercher
inutilement deux Read: feuilles feiülles entieremt similaires, et ils n’en purent jamais trouver
qui neussent dediferences sensibles
meme al’oeil, les microscopes en
decouvrent dans les objets que leur
petitese ns fait voir come semblables
parceque ns les voyons confusemt
ainsi les experiences qui meme ne
sont pas necessaires alaverité dece [31/32r] principe leconfirment encore.
17 Le principe dela raison sufisante bannit delaphilosophie
tous les raisonemens ala scolastique
car les scolastiques ademettoient bien
quil ni arien sans cause mais ils
alleguoient devains noms pr les
causes, or une cause nest bonne
quelorsquelles satisfont auprincipe
dela raison suffisante, c’est a dire
lorsque lon peut faire comprendre
par cette cause coment etpourquoi
un effet peut arriver. In-boxed note in the right margin: Il faut toujours qu’il yait quelque chose d’ou on puisse comprendre pourquoi cequi est apu exister. Car on nome cause cequi contient le
principe del’actualité d’une autre
chose, mais raison est precisemt
ce par ou on peut comprendre sa
A: possibilité dune chose possibilité or tout homme fait usage de son esprit et
de sa raison doit savoir non seulemt
quune telle chose est possible et qu’elle
Existe, mais aussi la raison pourquoi elle
existe. Il faut bien distinguer entre possible et actuel tout cequi n’implique point
contradiction est possible, mais non pas actuel
il est possible p E quecette table qui est quarrée deviennent ronde. [32v]
18 Cependant quoique cela soit possible celan’arrivera peutetre jamais
pourquune chose soit il nesuffit
donc pas qu’elle soit possible, il faut
que cette possibilité ait son accomplissemt
A: et c’est cet accomplissemt cequi nepeut arriver sans une raison sufisante par laquelle un etre intelligent
puisse comprendre pourquoi cette chose
B: qui de de possible devient actuelle
etc’est ce qu’onnome Existence, ainsi tout cequi Existe etant possible, ie puis conclure de
lexistence ala possibilité mais
non pas delapossibilité al’existence
ns apellons etre tout cequi est possible soit quil soit actuel ou non,
mais lorsque ns prenons par suposition
l’impossible pr le possible et que
ns l’apellons aussi un etre mais on les distingue par les mots etre impossible ou imaginaire
et detre reël ou vray.
19 Quoiquil ni ait pas deux particules dematiere entieremt A: semblables similaires dans l’univers il ya pourtant des etres semblables
ils sont tels lorsque cequi ns les fait
connoitre et distinguer est semblable par raport ace
que ns considerons actuellemt en eux
est semblable A: p E, et et que ie puis substituer lun ala place delautre [32/33r] sans rien changer, p E, quand une boule de plomb etuneboule
de piere sont d’un poids Egal
ie puis mettre l’une alaplace de
lautre etlabalance demeure
dans lememe Equilibre, etie dis
que les boules sont A: semblables identiques quant aleur poids.
20 Des etres sont semblables en tout A: quand ils sont determinés de la meme maniere dans toutes leurs determinations lorsque leurs determinations sont les memes, et les choses
ne peuvent etre distinguées quen
les rassemblant, ensorte que les
voyant deux, ns voyons necessairemt
quel’une n’est pas l’autre, deplus
ns les pouvons distinguer alorsvu
parleur grandeur, ou par leur situation
car bien que la grandeur soit une
diference interieure cependant elle
ne peut etre comprise que parla
comparaison que nos sens font d’un
objet aun autre, etsi ie veux
faire A: comprendre connoitre aquelquun la grandeur dune chose, il faut que
ie lui dise le raport quelle a une mesure qui lui est connuëe. [33v] Ainsi on peut definir lagrandeur ce par ou des choses ressemblantes
diferent, car bien quecette definition
paroisse dabord un peu obscure
cependant en y reflechissant
on vera quil est impossible d’entrouver
une autre.
21 Il ya bien deladiference entre semblable et egal, l’egalité
Read: a pour apr objet lagrandeur, ainsi sa grandeur est la diference des
choses semblables et la ressemblance
des choses dissemblables.
22 Deux choses sont dittes egales quand on peut mettre lune alaplace del’autre
et que tout reste lememe parraport
alagrandeur.
23 Vous trouverés dans lasuite dequel usage cette Expliquation dela ressemblance
et delegalité est utile dans les ma
thematiques et surtout dans
lalgebre oulon fait toutes les operations
en mettant cequi est egal aunechose
alaplace decette chose.
How to cite:
CHAPTER ONE, Version C. In: Du Châtelet, Émilie: Institutions de physique. The Paris Manuscript BnF Fr. 12265. A Critical and Historical Online Edition.
Edited by Ruth E. Hagengruber, Hanns-Peter Neumann, Aaron Wells, Pedro Pricladnitzky, with collaboration of Jil Muller. Center for the History of Women Philosophers and Scientists, Paderborn University, Paderborn.
Version 1.0, April 10th 2024, URL: https://historyofwomenphilosophers.org/dcpm/documents/view/chapter_one/version/c/rev/1.0