CHAPTER EIGHT
- CHAPTER EIGHT
- Eighth Chapter (Version G)
Eighth Chapter (Version G)
Dela divisibilité etsubtilité dela matiere
D: The bracketed section numbers are added later, in another (archivist’s) hand. This writer’s notes make clear that they were referring to the 1740 printed edition of the Institutions and attempting to reconstruct its section order in the manuscript.[CLXV.]
1[149v/4.4.]G: Above is the following marginal note: comencement du ch. 8L’extension peut etre concuë en longueur, largeur, et profondeur
ainsi laligne AB est Etenduë
enlongueur, la surface ABDE est
Etenduë en longueur et enlargeur, et
lecube ABCDEFGH est Etendu en
longeur, largeur, et profondeur
cesont lales trois dimentions de
l’etenduë.
[CLXVI.]
2E: Tous les corps ont Tout corps a E: les ces trois dimentions, et a parler avec exactitude
il ni a que des solides dans lanature
mais notre Esprit ayant lepouvoir
defaire des abstractions, ns pouvons
considerer lalongueur sans songer
ala largeur ni alaprofondeur, ns
pouvons considerer dememe lalongueur
etlalargeur seulement sans songer
ala profondeur, etc’est sur ces
abstractions denotre Esprit
quelageometrie est fondée, les
superficies les lignes, etles points
nesont donc point matiere, mais on les conçoit dans lamatiere E: come des modes delamatiere dememe que la figure, la couleur &ce par abstraction.
3 E: Cependant Ainsi pr aider l’imagina
tion, et pr se former une idée
distincte des trois dimensions de
l’etenduë, on peut imaginer deux points
A et B distans l’un del’autre etsuposer
que le point A allant trouver le
point B, laisse dans chaque E: point partie de
lintervalle qui les separe une production
deluimeme, il formera la ligne AB
quel’on supose Etenduë en longueur
seulemt.
4 On peut suposer ensuite que E: deux lignes AB, AD laligne AB coulant lelong dela ligne AD
laisse une production Not in E dellemene dans tout
chemin quelle parcourt pr
arriver du point A au point
D il sen formera lasurface A
BCD quel’on supose Etenduë en
longueur et en largeur.
5 Enfin si lasurface ABCD coule
le long dela surface CDEF il
sen formera lecube ABCDE
[F]GH lequel ales trois dimension[s]
delanature puis quil Est Etendu en
longueur, largeur, et profondeur. [134/146r/1]
6 Laplupart des philosophes ayant confondu ces abstractions de notre esprit
avec lecorps phisique ont voulu
demontrer ladivisibilité dela matiere alinfini
par les raisonemens des geometres sur
la divisibilité des lignes, qu’on pousse
jusqu’a l’infini, cequi adonné lieu a
ce labirinthe fameux deladivisibilité
du continu qui atant embarassé les
philosophes, mais ils se seroient Epargné
toutes les dificultés que cette divisibilité
entraine sils avoient pris soin dene
jamais apliquer les raisonemens que
l’on fait sur ladivisibilité du corps
geometrique aux corps naturels
et phisiques.
[CLXIX.]
7Le corps geometrique n’est quela simple Etenduë, il n’a point departies [146v/2] determinées et actuelles, il necontient que des parties simplemt possibles qu’on
peut augmenter tant qu’on veut al’infini,
car la notion del’etenduë nerenferme que
des parties coëxistantes et unies, etle
nombre de ces parties est absolument
indeterminé, et n’entre point dans la
notion del’etenduë, ainsi on peut sans nuire al’etenduë
determiner la nombre comme on veut
cest adire que l’on peut Etablir qu’une
Etenduë renferme, dix mille, ou un million, ou
dix mille millions, ou &cc departies
selonquel’on voudra accepter une partie
quelquonque pour un, ainsi uneligne
renfermera deux parties, si on prend samoitié pr une, et elle en aura
ou dix ou mille, si on prend
sa dixieme ousamillieme partie
pr l’unité, ainsi cette unité est absolumt
indeterminée, et depend dela volonté
de celui qui considere cette Etenduë.
[CLXX.]
8Chaque Etenduë abstraite et geometrique peut donc etre Exprimée par un nombre quelquonque,
mais il en est tout autrement ds
lanature, toutcequi Existe actu
ellement doit etre determiné en
toute maniere, etil nest point
en notre pouvoir deledeterminer
autrement, une montre, PE, a ses parties, mais cenesont point des partie[s] [135/147r/3] simplement determinables par l’imagination, cesont des parties reelles, actuellement Existantes
etil nest point libre de dire, cette montre a dix, cent, ou un million departies, car en tant que montre elle en a un nombre
determiné qui constituent son essence
etelle n’en peut avoir ni plus ni moins
tant quelle restera montre
il en est dememe detous les corps
naturels, ce sont tous des machines qui
ont leurs parties determinés,
et dissemblables quil n’est point permis
dexprimer par un nombre quelquonque. G: The page number 4.1 was added by an archivist, as are the subsequent page numbers with superscripts. In this case, the page number replaces two prior cancelled attempts to number the page: 6 and 51.[136/148r/4.1]
9 C’est enconfondant l’etenduë geometrique etletenduë phisique etensuposant que
letenduë phisique est toujours composée
alinfini departies Etenduës que les
anciens avoient formé ces argumens
si faux etsi specieux contre la
possibilité du mouvemt.
10 Le plus fameux detous ces sophismes Etoit celui que Zenon avoit apellé
l’achille pr marquer sa force invincible il suposoit achille courant aprés
une tortuë, et allant 10 fois plus
vite quelle, E: et il il donnoit une lieuë davance ala tortuë, et il raisonoit
ainsi, tandis qu’achille parcourt
E: cette lieuë la tortuë parcourt lalieuë quela tortuë adavance sur lui, celle cy parcourera un dixieme delieuës, pendant qu’il
parcout le 10.e la tortuë parcourt G: Here in the margin is a boxed, canceled note: cela estil bien, et[c]e sophisme estoitil fait pr prouver limpossibilité du mouvement un centieme Not in E delieuës, et ainsi de dixieme endixieme la tortuë devancera
toujours achille qui nel’atteindra
jamais.
11 Premieremt, quand il seroit vray qu’achille n’attrapat jamais latortuë [148v/4.2] il nesensuivroit pas pr cela quele
mouvemt fut impossible, car achille
et latortuë semeuvent reëllement, puis
qu’achille aproche toujours delatortuë
qui est suposée le devancer toujours,
mais secondemt, cet ingenieux sophisme
Etant fondé sur la divisibilité de
l’etenduë a l’infini, E: il tombe necessairemt par la distinction deletenduë geometrique, et deletenduë phisique car cette derniere Etant alafin composée d’etres simples ses divisions meme possibles ont des bornes positives et reëlles; il tombe necessairemt par la distinction deletenduë geometrique, et deletenduë phisique car cette derniere Etant alafin composée d’etres simples les divisions ont des bornes positives et reëlles Fle principe dela raison sufisante le renverse facilement
car on a vu quil est prouvé par ce principe que l’etenduë phisique est alafin composée
d’etres simples et que par consequent ses divisions meme possibles
sont des bornes positives et reelles.
12 On a escrit des traités entiers pr resoudre ce sophisme de Zenon
peutetre suffisoit il demarcher en
sa presence come fit diogene, mais
outre cette reponse defait, on vient
de voir qu’il Etoit aisé d’en faire
une de droit.
13 Gregoire de St. Vincent fut lepremier qui en demontra la
fausseté et Not in E qui E: assigna par le moyen des progressions geometriques infinies le point assigna le point precis auquel achille devoit attraper la tortuë, E: et il fit et ce point se trouve parle moyen des progressions geometriques infinies E: car aubout dune lieuë et d’un 9.e delieuë car la somme detoute progression geometrique infinie, est finie, etcela, parceque
etre infini, ou setendre alinfini sont deux choses tres diferentes, E: et cela parcequun car un tout fini [137/149r/4.4] quelquonque, un pied, p. E, estun
composé defini, et dinfini, cepied
est fini entant quil necontient quun certain nombre d’etres simples
mais ie puis le suposer divisé en un
infinité ou plutost enune quantité
non finie departies, en E: ne considerant considerant
ce pied come une Etenduë abstraitte
ainsi si jay pris dabord dans mon
esprit la moitié dece pied et que
ie prenne ensuite lamoitié dece
qui reste ou un quart depied, puis
lamoitié dece quart ou un huitieme
ie procederai Not in E ainsi mentalemt alinfini en prenant toujours denouvelles
E: parties moitiés decroissantes, E: et qui qui toutes ensemble ne feront jamais quele
pied E: qui lequel devient alors uncorps geometrique parceque Not in E detoutes ses proprietés ie nay retenu dans mon esprit quetelle d’etenduë, sur
laquelle ma division ideale
E: sopere s’est operée, ainsi ladivisibilité de letenduë alinfini esten meme
tems une verité geometrique
et une erreur phisique, et
tous les raisonemens sur la divisibilité dela E: matiere fondés matiere [138/150r/5] tirées dela nature des asimptotes delincommensurabilité deladiagonale
du quarré, des suites infinies, et
dautres considerations geometriques
sont absolument inaplicables aux
corps naturels dememe que les
theoremes demr. Keills parles quels il pretend prouver qu’avec ungrain
desable on pouroit remplier
l’univers entier, car l’on ne doit
admettre dans la phisique que des
parties actuelles dont l’existence
peut etre demontrée par l’experience ou parle E: raisonement. Les difficultés qui naissemt deladivisibilité dela matiere al’infini sont la source dans laquelle les anciens puisoient ces sophismes si fameux contre la possibilité du mouvement, et il faut avouer que la plus grande partie de ces dificultés est insoluble lorsque l’on regarde letenduë come composée de parties Etenduës alinfini, et lorsque lon ne distingue pas le corps geometrique du corps phisique ainsi cest en vain que les anciens cherchoient une issuë dans ces labirinthes d’erreurs dans lesquels il ni en pouvoit point avoir pour eux. Following this is a canceled marginal note: raporteraisje icy les sophismes surtout achille et Cronus. raisonement. [139/151r/7]
14 Quoique les divisions que la matiere peut E: souffrir subier ayent des bornes reelles, cependant les experiences E: montrent ns decouvrent une subtilité dans les parties des corps naturels
qui Etonne limagination
et qu’on nesauroit assés admirer, mr. Volf a observé dans l’espace
d’un grain depoussiere 500 oeüfs dont il
est Eclos des animaux semblables
a des poissons, dans les quels on remarque
une infinité departies come dans
les plus grans animaux dela mer.
15 Le meme auteur fait voir que l’espace d’un grain d’orge peut
contenir 27 millions d’animaux
vivans qui ont chacun 20 ou 24
pieds, et que le moindre grain de
sable peut servir dedemeure a
294 millions d’animaux organisés qui propagent leur espece, etqui [151v/8] ont des nerfs, des veines, et des fluides qui les remplissent, et qui
sont sans doutte aucorps de cet animal
dans lameme proportion que les
fluides denotre corps sont asa masse.
16 L’ouvrage des tireurs etbatteurs d’or fournit debelles preuves dela
subtilité des parties dela matiere
mr. boyle raporte qu’un seul grain d’or battu enfeuille remplit l’espace
de 50 pouces quarrés mesure geometrique, mais si on divise
le coté d’un pouce en 200 parties, ou la
ligne en 20, cequi fait encore des par
ties visibles al’oeil etsans microscope,
chaque pouce quarré aura 40000 parties
d’or qu’on poura encore distinguer sans
microscope, et parconsequent toute
la feüille aura deux millions departies,
visibles al’oeil seulement, et si lon ajoute
a cela qu’une telle feüille est encore
divisible dans son Epaisseur en six
feüilles au moins, come on lepeut con
clure par les observations demr. de reaumur qui a observé que l’epaisseur
d’une feüille d’or est environ la 1/30000
partie d’une ligne, et lepaisseur del’or
aux fils dargent la 1/170000 partie dune ligne [140/152r/9] par consequent argent est Environ 6 fois moins Epais qu’une feuille dor, E: et car ainsi cette feuille dor reduite alepaisseur d’une feüille dargent seroit divisée en six il sensuit quechaque grain
d’or renferme environ 12 millions
departies discernables alasimple vuë,
or come ces parties nesont que del’or
et restent encore del’or quand onles
regarde par des microscopes qui aug
mentent un objet jusqu’a vint ou
trente mille fois, et qui parconsequent
montreroient encore 30 mille parties dans
chaquune deces 12 millions
departies que l’oeil seul distinguoit
dans ce grain d’or, on peut concevoir
jus qu’a quel point definesse lanature
subdivise lamatiere.
17 Car l’or E: doit etre est une mixtion dautres matieres plus fines qui nesont point del’or, et renferme
encore une infinité depores remplis
dune autre matiere que sa matiere propre
or puis qu’apres cette Enorme division
on ne distingue encore ni les parties
constituantes del’or, ni lamatiere qui passe atravers ses pores, on
peut encore moins esperer de
voir jamais les figures etles mouvemens
deces parties du mixte qui doivent
contenir laraison immediate des
qualités que ns remarquons dans l’or, E: qui les quelles parties sont encore composées elles memes des Etres simples. [152v/10]
[§. CLXXV.]
18Ces considerations ns montrent quela subtilité des parties dela
matiere est inexprimable, et quil
ni a personne qui puisse jamais determi
ner lenombre departies dontungrain
desable est composé, puis que cenombre
passe notre imagination ettout ceque ns
pouvons ns figurer, etcome laraison
ns montre quecette division na point
debornes et que lamatiere necesse point
E: d’etre actuellemt divisible d’etre divisible tant quelle est
matiere,
on peut dire que
par raport ans la matiere est non
seulemt divisible, mais divisée alinfini
car linfini est pr nous E: une quantité plus grande une quantité quaucun nombre ne peut Exprimer quoique reëllemt ses divisions ayent
des bornes, car ces bornes
sont si reculées quelles setendent jusqu’a linfini
pr ns.
[§ CLXXVI.]
19Il est donc Evident qu’il ya dans lanature une infinité dematieres diversement figurées, et
differemment muës, les quelles Echapent anos sens et anos observations
par leur petitesse, et qui cependant
produisent les phenomenes
que ns observons, et les raisons
premieres des qualités phisiques se
trouvant toutes dans ces matieres
diversement figurées quil ns est impossible de
distinguer, ns devons en conclure qu’il peut
se passer une infinité dechoses dans le moindre [141/153r/11] espace come dans lemonde Entier mais lattention humaine nepoura
jamais les apercevoir, etcest beau
coup pr notre Entendemt d’avoir
pu seulement en connoitre la
possibilité, ainsi c’est perdre notre
tems que de vouloir Essayer de deviner
les misteres imperceptibles, etns
devons ns borner aobserver soig
neusemt les qualités et les phenomenes qui en
resultent, et qui tombent sous nos sens,
et dont ns pouvons faire usage pr
rendre raison dautres phenomenes
qui en dependent.
[§. CLXXVII.]
20Tous les corps contiennent deux sortes dematiere, lamatiere propre
etla matiere Etrangere,
la matiere propre peutetre
ou E: coherente constante, ou variable
la matiere constante est celle sans laquelle
lecorps ne peut point subsister, la matiere
variable est celle qui s’arrete
quelquefois dans les pores les plus
larges, come l’air etl’eau, P E, qui
augmentent lepoids des corps en
sintroduisant etsarretant entre
leurs parties, toute lamatiere propre
d’un corps repose E: et se se meut, peze et agit
avec lui, etla matiere
Etrangere celle qui ne se meut point
avec le corps, mais qui passe libremt
atravers ses pores come leau atravers
dune quaisse percée deplusieurs
trous.
[§. CLXXVIII.]
21La realité del’existence deces deux matieres se demontre aisement
par l’experience, elle ns aprend que les corps ont differentes
densités et des poids differens, leau peze plus que l’air, et lor est plus [153v/12] dense que lebois etpeze davantage.
22 Toutes les matieres jus qualor meme, laplus
dense detoutes, ont des pores qui ne
sont point remplis dela meme matiere,
or come il ni apoint devide absolu dans les
corps, il est necessaire que ces pores
soient remplis d’une matiere
Etrangere, qui ne peze point avec
les corps, et qui ne choque point
avec eux, lorsqu’ils en rencontrent
d’autres dans leur chemin, mais qui
remplit tous leurs interstices et qui
semeut atravers avec autant deliberté
que lair atravers un crible, etl’eau
atravers un filet.
[§. CLXXIX.]
23Cest encore cequi peut
se prouver par la cohesion
car puisque leprincipe dela raison sufisante
bannit E: les indiscernables delunivers et les atomes quelle le vide dentre les parties des corps
et montre quil ne sauroit
yavoir deux parties dematiere indiscernables
l’une del’autre dans l’univers, il nepeut
yavoir E: de deux figure[s] de figure ni de diversité
dans lanature que parle mouvemt
car si toutes les parties delamatiere
reposoient les unes auprés des autres
il est evident quil E: ni auroit n’en resulteroit qu’une
parfaite continuité similaire sans [142/154r/13] aucune figure, E: toute la matiere est donc en mouvemt F: toute la matiere est donc non seulement en mouvemt il est donc
necessaire non seulemt quela
matiere se meuve, mais que
son mouvement soit varié
alinfini dans
sa vitesse et dans sa
direction pr quil
puisse enresulter
les differentes qualités
ettoutes les differences
internes des parties de
la matiere, or lorsque
plusieurs parties dela
matiere paroissent [153v/12] etre sans force, et dans un repos parfait, il faut que lemouvemt de
ces parties tende vers des directions
oposées avec lameme force, les
unes vers les autres et quelles sarretent parconsequent
dans lameme place, cequi fait lacohesion, car on sait que deux [142/154r/13] corps fortemt pressés l’un contre l’autre nepeuvent etre separés que dificilement,
et semblent ne
faire qu’un seul corps, cemouvemt
conspirant est donc lorigine dela
cohesion selon lesentiment demr. de leibnits et de ses disciples, or ns
avons vu que ledegré de vitesse dont
un corps est mu etla direction de
son mouvemt nesont determinés que
par le mouvemt de quelqu’autre corps
qui encontient la raison sufisante
ainsi afin que desparties
se meuvent dans des directions oposées
avec des vitesses Egales et qu’elles coherent
parce moien, il est necessaire que le
mouvemt dune maniere externe
qui ne cohere point avec ces parties
determine leur direction etleur vitesse
il ya donc des matieres tres fines
et tres rapidemt muës qui sederobent
a nos sens et qui produisent plusieurs
effets que ns remarquons; dece
genre sont vraisemblablemt lamatiere
magnetique, lamatiere Electrique
celle du feu, dela cohesion, del’elasticité
dela pesanteur, etsans doutte une
infinité d’autres qui se modifient diferement, et qui concourent en [154v/14] diverses manieres pour produire les qualités sensibles des corps.
[§. CLXXX.]
24Ces reflexions doivent precautioner contre laprecipitation dequelques
philosophes qui lorsquils voyent des
phenomenes que les fluides quel’on
supose n’ont pu expliquer jusqu’a
present, tranchent le noeud qu’ils
devroient delier, et decident qu’aucun
fluide quelqu’il puisse etre nepeut
produire les effets que ns observons,
car pr former une telle decision il
faudroit connoitre toutes les facons
dont lamatiere peut etre muë et
tout cequi peut resulter detous ses
mouvemens divers, mais c’est
dequoi ns sommes encore bien Eloig
nés.
[§ CLXXXI.]
25Les seules Experiences del’electricité montrent assés quels effets
singuliers la nature peut produire
parle mouvement des matieres subtiles, ces matieres
E: tombent sous nos sens qui se font apercevoir sensiblemt
dans ces experiences,
cependant celui qui entrepren
droit dexpliquer mechaniquement parle moien du mouvement et d’un fluide [143/155r/15] tres subtil tous les phenomenes de l’electricité entreprendroit un
probleme infiniment plus dificile
quecelui de lacause qui fait mouvoir
les planetes, car dans lemouvemt
des planetes il regne une grande
regularité etune grande uniformité
mais les phenomenes delectricité
sont diversifiés presqu’a l’infini,
cependant oseroiton conclure pr
cela quil est im possible que les
phenomenes del’electricité soient
Executés par des fluides, non sans
doutte, ns ne devons donc point
ns decourager
parceque jusqu’a present
on na pu parvenir adeviner tous les secrets dela nature
les premiers ressorts Eluderont
peutetre ajamais nos recherches
parleur finesse etleur multiplicité
mais en cherchant ales deviner
on nelaisse pas defaire sur la
routte bien des decouvertes qui ns en aprochent. [155v/16]
[§. CLXXXII.]
26Ainsi quelque dificile que soit E: cette aplication laplication des principes mechaniques aux
effets phisiques, il ne faut point se decourager, ni abandonner jamais
cette maniere de philosopher
qui est laseule bonne, parcequ’elle
est laseule dans laquelle on puisse
rendre raison des phenomenes d’une
façon intelligible, on ne doit pas
sans doutte en abuser, et pr lex
pliquer mechaniquement les
effets naturels creer des mouve
mens et des matieres asongré
(qui ordinairement meme dans
lexplication ne produisent point
l’effet qu’on s’en Etoit promis )
sans se mettre en peine d’en demontrer
l’existence
mais il nefaut pas non
plus borner lanature au
nombre de fluides E: quil ns plai[t] dont ns
croions avoir besoin pr lexplication
des phenomenes
come ont fait plusieurs philosophes et en particulier [144/156r/17] mr. Hartsoëker qui avoit choisi pr rendre raison des phenomenes deux especes d’elemens,
l’un par
faitemt fluide, l’autre absolumt
solide et dur, et qui croioit
Le monde composé de ces
deux especes de matiere qu’il
suposoit inalterables,
mais mr. deleibnitz lui fit voir que ces deux matieres
ou Elemens n’etoient qu’une fiction, contraire auprincipe dela [156v/18] raison suffisante, car ce principe est la piere detouche qui distingue la verité delerreur, E: ceux qui conoissent la varieté infinie qui regne dans lanature etle mechanisme admirable qui y est employé ne fixent point ainsi lenombre et les qualités des ressorts delanature a ceux dontils croyent avoir besoin pr lexplication des phenomenesceux qui
connoisent la diversité
qui regne dans lanature, etle mechanisme admirable
qui yest emploié ne fixent point ainsi par une hypothese temeraire
le nombre et les qualités des ressorts quelle
Emploie, mais ils nadm[et]
tent que ceux dont l’experience ou
des raisonemens inebranlables
demontrent l’existence.
27 On a vu cidessus que les atomes
ou parties in secables delamatiere
sont inadmissibles quand onles
regarde come des matieres
simples, irresolubles, et primitive[s]
parcequ’on nepeut point done[r]
alors de raison sufisante deleur
Existence, mais lorsqu’on reconnoit
qu’ils tirent leur origine des
etres simples, on peut fort bien
les admettre, car il est tres possible
etles experiences rendent tres vrai
semblable qu’il y a dans lunivers
un certain nombre determiné
de parties de matiere que la nature
ne resout jamais dans leur principe
et qui restent indivisées dans la
constitution presente decet univers
et que tous les corps qui le composent
resultent de la composition et de
lamixtion de ces particules solides
ensorte qu’on peut les regarder come des
Elemens douës de figures et de diferences internes qui resultent deleurs [145/157r/19] parties.
28 Quela nature s’arrete dans l’analyse dela matiere aun certain degré
fixe et determiné, c’est cequi est assés
probable, parl’uniformité qui
regne dans ses ouvrages
et par toutes les Experiences.
29 1°. Si la nature Etoit resoluble alinfini il seroit impossible queles
memes germes etles memes semences
produissent constamment les
memes animaux, et les memes
plantes, qu’ils aquissent leur croisance
toujours Exactemt dans lememe
espace detems, quils conservassent
toujours les memes proprietés, et
qu’ils fussent tels apresent qu’ils
Etoient autrefois, carsi le suc
qui les nourit Etoit tantot plus
subtil, ettantot plus grossier, il
seroit impossible qu’ils nefussent pas
sujets ades variations perpetuelles
puisque lorsque les parties decesuc
seroient plus subtiles, il faudroit necessairement plus detems [157v/20] pr laccroissemt du meme corps quelorsque ce suc auroit plus
deconsistence, etce corps par
conséquent seroit plus ou moins
solide, et aquerreroit sa croissance
en plus ou moins detems selon
que les parties du suc qui lenourit
seroient plus grossieres ou plus
subtiles, ainsi la forme etlafaçon
d’etre dans les composés seroient sujettes
a mille changemens, etles especes
des choses seroient atout moment
broüillées.
30 Or, il ni a aucun de ces derangemens dans l’univers, les plantes,
les animaux, les fossiles, tout
enfin produit constament son
semblable avec les attributs qui
constituent son Essence, lamatiere
n’est donc pas actuellemt resoluë
a l’infini.
31 2° Si les parties dela matiere se resoluoient al’infini non seulemt
les especes semesleroient, mais il s’en formeroit tous les jours de [146/158r/21] nouvelles, or il ne seforme aucune nouvelle espece dans la
nature, les monstres meme ne per
petuënt point laleur, lamain
du createur amarqué les bornes
dechaque etre, etces bornes ne
sont jamais franchies, cependant
si lamatiere se divisoit a linfini
elles leseroient atout moment
l’ordre qui regne dans l’univers
etla conservation decet ordre
paroissent donc prouver quil ya des parties
solides dans la matiere.
32 3°. Les dissolutions des corps ont des bornes fixes aussi bien
que leur accroissemt, ainsi le
feu du miroir ardent, le plus
puissant dissolvant que ns connoissions
fond l’or, le pulverise,
et levitrifie, mais ses effets ne
vont point audela, cependant
si lamatiere Etoit resoluble a
l’infini, le feu devroit tout
detruire, et l’on ne pouroit
dire ni pourquoi les liquides naquerrent jamais qu’un certain degré de [158v/22] chaleur determiné, ni pourquoi l’action dufeu sur les corps a des bornes
si precises, si la solidité et
l’irresolubilité actuelle netoient
pas attachée aux parties dela matiere
quand elles passent une certaine
petitesse, et noposoient pas une
barriere insurmontable al’action
dece puissant agent.
33 G: Here in the margin is the following canceled note: cette raison estelle bone vs n’en donniés point4° G: Here in another (archivist’s) hand is the following marginal note: Suite de la §. CLXXII Cette indivisibilité des premier[s]
corps devient indispensablemt
necessaire si lon adopte le
sisteme des germes, que les
nouvelles decouvertes que l’on
afait par le moien des decouverte[s]
semblent demontrer, tout le mon[de]
connoit celles de mr hartsoeker ca[r]
il devient tous les jours plus [22 bis] G: Here in another (archivist’s) hand is the following marginal note: Suite de la §. CLXXII. vraisemblable que la nature nagit que par developemens, or su chaque grain de bled contient le germe detous les bleds qu’il doit produire
il faut necessairemt que les divisions actuelles
dela matiere ayent des bornes, quoique ces
bornes soyent inassignables pour nous [158v/22] il est donc bien vraisemblable quil ya des particules dematiere dune certaine petitesse determinée
que lanature ne divise plus.
34 G: Here in another (archivist’s) hand is the following marginal note: §. CLXXIII. Voyez ci dessus, f° 5. Si lon demande la raison sufisante
decette D: Read: irresolubilitéirrosulibité actuelle des
petits corps dela matiere
il sera aise de la trouver
dans les mouvemens cons
pirans deleurs parties
car ces mouvemens sont
la seule cause dela cohesion
selon mr. deleibnits.
35 G: Here in another (archivist’s) hand is the following marginal note: §. CLXXIII. pag. 197. La petitesse de ces parties
indivisées dela matiere surpasse
si fort tout
ceque nos sens peuvent decouvrir
quil ni aucune esperance que ns
en puissions jamais connoitre les
qualités, lemouvemt, etles figures
cequi ns fait voir
combien ns sommes loin des
etres simples dont ces parties
solides sont formés.
36 G: Here in another (archivist’s) hand is the following marginal note: §. CLXXIV. p. 198. Ainsi on se tromperoit, si on croioit pouvoir rendre raison des phenomenes qui [147/159r/23] tombent sous nos sens par lasimple figure etla
grandeur des parties, puisque ns ne
savons point combien demelanges
des parties primitives etirresolubles
ont eté necessaires avant que les
parties sensibles en soyent resulté
car tant quelamatiere d’un corps
est composée dautres parties
melangées ensemble, il
faut determiner ladifference
deces parties, par les matieres qui
les composent et par laproportion dans laquelle elles sont melées ainsi
si quelquun vouloit expliquer les effets dela poudre Not in E acanon, il faudroit quil comencait
par determiner de combien de
sortes dematiere elle est composée
etla proportion deleur mixtion
avant que depasser ala figure de
ses parties car
jus qu’a ceque lon ait determiné
Les matieres melangées, etleur
proportion, on ne doit point
determiner lafigure etla
grandeur des parties dontil
nest permis deparler que lorsquon
est arrivé aux matieres primitives, carles qualités phisiques
E: telles que qui sont leffet des causes
mechaniques doivent necessairemt
les preceder dans l’explication
des phenomenes,
37 G: Here in another (archivist’s) hand is the following marginal note: §. CLXXXV. p. 199. Mais come il ns reste peu d’esperance de decouvrer les matieres [159v/24] plus simples parles mixtions desquelles les corps sensibles
resultent, un phisicien qui ne
veut pas perdre sontems doit
se contenter de decouvrir les
raisons les plus prochaines
quel’industrie humaine peut
apercevoir, et n’admettre dematieres
et demouvemens queceux dont
lexistence peutetre demontrée.
How to cite:
CHAPTER EIGHT, Version G. In: Du Châtelet, Émilie: Institutions de physique. The Paris Manuscript BnF Fr. 12265. A Critical and Historical Online Edition.
Edited by Ruth E. Hagengruber, Hanns-Peter Neumann, Aaron Wells, Pedro Pricladnitzky, with collaboration of Jil Muller. Center for the History of Women Philosophers and Scientists, Paderborn University, Paderborn.
Version 1.0, April 4th 2024, URL: https://historyofwomenphilosophers.org/dcpm/documents/view/chapter_eight/version/g/rev/1.0